Gilles PASCAL dessine l'Irlandaise : BD, western et bad girl

J’ai récemment discuté avec Gilles PASCAL, dessinateur de la BD « L’Irlandaise » aux éditions du Point d’Exclamation.

BD

En Français dans le Texte : Peux-tu nous expliquer comment fonctionne ton duo avec le scénariste Jacques PAVOT sur l’Irlandaise ?

Gilles PASCAL : En fait, à partir d’un pitch élaboré ensemble, Jacques écrit le scénario, les dialogues et propose un découpage. Ensuite, nous discutons ensemble des différents plans, de l’articulation des scènes. Je propose ensuite un story-board. Nous travaillons en flux tendu, page par page, cela permet de faire évoluer des scènes ou de changer de point de vue en cours de réalisation. Ainsi , rien n’est figé : les personnages ou l’action peuvent prendre des orientations différentes en fonction d’un dessin, d’un décor, d’un accessoire, d’un dialogue, d’un élément historique non prévu initialement : la diégèse s’en trouve améliorée, du moins nous semble-t-il, mais nous gardons toujours à l’esprit le sens et l’idée générale du projet.

EFDLT : Tu parles de diégèse… j’imagine que tu apportes une grande attention à la synergie entre le travail du dessinateur et celui de scénariste ? En gros, les récitatifs à la Blake et Mortimer, c’est pas ta came, si ?

Gilles PASCAL : Effectivement c’est un point essentiel dans notre optique narrative. Faire la synthèse entre deux points de vue, au sens littéral du terme, tant au niveau visuel que narratif. Des éléments peuvent être cohérents et judicieux à l’écrit mais peuvent perdre leur légitimité une fois mis en image. Une écriture engage une lecture « linéaire » or une page BD est avant tout un élément visuel. Je passe donc beaucoup de temps à composer une page, avec un point d’ancrage autour duquel s’articule le récit. D’où le parti pris aussi d’éviter les récitatifs descriptifs ainsi que les pensées et dialogues intérieurs d’un personnage, je préfère suggérer par l’image plutôt que d’écrire. Cela sera plus présent et visible dans le tome 2 par rapport au tome 1.

Il y a aussi le fait que je suis pas forcément à l’aise graphiquement avec certains plans et cadrages auxquels Jacques aurait préalablement pensé, ou souhaité. D’où la nécessité de trouver des compromis.

EFDLT : Vous avez donc changé de façon de travailler entre le tome 1 et le tome 2 ?

Gilles PASCAL : La maturité aidant, oui. Le premier tome a été réalisé sans que l’on ai de promesses d’édition et de publication, donc nous prenions notre temps, dans un style graphique encore balbutiant , nous partions dans l’inconnu, et tournions souvent en rond . On avait réalisé une trentaine de pages avant de commencer à démarcher. À la suite de la signature du contrat, nous avons tout remanié car il y avait de
grosses différences graphiques entre les premières pages et les dernières, il fallait surtout assurer une cohésion de l’ensemble. Après la parution (enfin !), nous savons maintenant pour qui et pourquoi nous travaillons, en tenant compte des remarques, critiques, des exigences éditoriales, du rendu de l’impression : enfin, plein de facteurs transversaux, fondamentaux mais inhérents à l’élaboration.

Pour ma partie, et modestie mise à part, je me sens beaucoup plus armé graphiquement, ayant digéré, je pense toutes les influences des auteurs dont j’admire le boulot.

(suite de l’entretien dans le prochain billet !)