Mythe & Super-héros

Alex Nikolavitch : essai sur les comics de super-héros et la mythologie

Alex Nikolavitch est à la fois scénariste de BD et traducteur de comics. Avant ses débuts professionnels dans ces deux métiers, il a même commencé sa carrière de bédéaste en écrivant divers articles dans des fanzines comme Direct Importation, spécialisé dans les comics. Il fait également partie des premiers chroniqueurs vedettes à avoir inauguré le site Superpouvoir.com en 2004. Grand connaisseur de super-slips, Alexis se fend d’un ouvrage aussi pertinent que subjectif : Mythe & Super-héros, chez les Moutons électriques, dans la Bibliothèque des Miroirs.

EFDLT : Alex, tu viens de publier Mythe & Super-Héros aux Moutons électriques. C’est un ouvrage passionnant qui fouille dans les origines lointaines de nos héros. Voire dans notre besoin de héros. D’après toi, quel est le rôle des super-héros de Marvel ou de DC Comics ?

Alex Nikolavitch : Comme pour tout personnage légendaire : être des icônes sur lesquels projeter des problématiques humaines, des outils de distanciation qui finissent par devenir des modèles, en positif ou en négatif, mais surtout des outils de mise en perspective du réel. On sait que Superman ou Hercule n’existent pas en vrai. Mais leurs aventures peuvent donner des clés d’analyse. Et donner l’occasion de réveiller son Superman ou son Hercule intérieur.

Superman est un mythe moderne à la hauteur d'Atlas ou d'Hercule

EFDLT : En tant que scénariste, quand tu écris une histoire, est-ce que tu cherches justement à réveiller le Superman intérieur de tes lecteurs ? Ou le Loki ?

Alex Nikolavitch : Pas forcément. Je n’écris que rarement du super-héros. Ce que j’écris s’inscrit souvent dans une autre tradition, les héros de mes histoires sont souvent des paumés, des gens esquintés par la vie, qui se retrouvent face à des choix à la con. La force dont ils ont besoin pour faire ces choix est sans doute d’une autre nature. Mes personnages sont souvent moins proactifs que des super-héros, ils sont un peu écrasés par le destin. Ils posent des questions plus qu’ils ne vont chercher un Superman. Mais un jour, j’aimerais bien écrire un vrai beau personnage de méchant qui réveille le Loki, oui.

EFDLT : D’après toi, il y vraiment une barrière entre les histoires de super-héros et les autres ? Elle tient à quoi, cette barrière ?

Alex Nikolavitch : Entre autres à l’aspect mythologique des super-héros, à leur aspect plus grand que nature. Après, barrière, pas forcément : dans ce genre de choses les barrières ne sont jamais étanches. Mais une différence de fond, oui, qu’ils partagent avec les héros de roman populaire comme Tarzan, qui sont leurs “ancêtres” directs. Les super-héros offrent une bibliothèque d’archétypes qui vont orienter le récit. Même quand on fait un récit intimiste et humain avec un super-héros, il ne se conçoit qu’en contrepoint des aspects plus pyrotechniques, des aspects “Superman jette des voitures à la tête de Lex Luthor”.

En 1988, Spidey fait un clin d'oeil aux 50 ans de son pote le Grand Bleu

EFDLT : Toi, tu préfères écrire des récits intimistes et humains sans bagarre à côté ?

Alex Nikolavitch : Disons que j’ai plus de facilités à le faire. J’ai fait des trucs de grosse bagarre, mais c’est plus difficile à écrire en ce qui me concerne, plus compliqué à chorégraphier et à rythmer. Sur Crusades, d’ailleurs, la coécriture m’avantage : mon collègue prend en charge les grosses scènes d’action, et j’écris plutôt les mystères, la diplomatie, les coups de couteau dans le dos. Mais sur Tengu-Do, par exemple, qui était une série de samouraïs, quand même, il y a quoi… Une quarantaine de pages d’action sur 360 pages de récit ? Allez, cinquante pages d’action tout au plus.

[à suivre]

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